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Pétain : Soixante dix ans après

À l’ami historien Jacques Boncompain, auteur du livre essentiel « Je brûlerai ma gloire », membre du comité directeur de l’ADMP.


 

Par Le lieutenant Louis de Condé, vice-président de l’ADMP.

Nous avons parcouru la route poitevine,
Elle nous a conduits au bord de l’océan,
Nous avons embarqué au port de Fromentine,
Que nous avons connu, il y a plus d’un an.

Nous sommes parvenus au bout de la Vendée,
Et nous sommes montés sur un fort beau bateau,
Qui traversa la mer vers l’ile désirée,
Car nous sommes venus prier sur un tombeau.

Nous avons débarqué hier à Port-Joinville,
Sous un soleil radieux avec les vacanciers,
Qui transforment ce port en une grande ville,
Avec dans les bassins de très nombreux voiliers.

Pour atteindre le quai nous avons fait la file,
– C’était la veille au soir de ce vingt-trois juillet –,
Parmi des gens heureux amoureux de cette ile,
Qu’il nous faudra demain quitter avec regret.

Nous voici de nouveau dans cette ile atlantique,
Où la mort a fauché notre vieux Maréchal,
Ici finit sa vie et son destin tragique,
Puisqu’il fut condamné par un vil tribunal.

L’Hôtel des Voyageurs apprécié des touristes;
En ce mois de juillet, comme en juillet prochain,
Accueille tous les ans aussi les « pétinistes »,
Ces fidèles soutiens du Maréchal Pétain.

Nous prendrons le chemin qui mène au cimetière,
C’est là qu’on mit en terre un sublime héros ;
À Saint-Cyr commença son illustre carrière,
On lui nia le lieu de son dernier repos.

Car c’est à Douaumont tout près de l’ossuaire
Au milieu des poilus qu’il voulait reposer,
Mais il est isolé, loin des siens, solitaire,
Loin de ce lieu sacré il fallait l’écarter.

Il était le plus vieux des prisonniers du monde,
Quand il mourut âgé de quatre-vingt-quinze ans ;
Nous venons exprimer notre peine profonde,
Et dénonçons en chœur dictateurs et tyrans.

Devant l’indignité chacun de nous est triste
La colère nous ronge, autant que le chagrin ;
Malgré le temps passé le scandale persiste,
Et nous sommes venus le crier ce matin…

Il avait bien prédit : « Je brûlerai ma gloire ! »
Quand on lui imposa d’être chef de l’État,
Lui qui fut l’artisan de l’immense victoire,
Après le dramatique et terrible combat.

Et nous prions pour toi, victime expiatoire !,
De ces faux magistrats, de ces fourbes jurés,
Du lâche procureur qui ont truqué l’histoire,
Mais la postérité juge ces conjurés.

Il s’est pour nous Français offert en sacrifice,
Il avait tout compris de ce qui l’attendait,
Il s’était préparé pour le dernier supplice,
Depuis que les bourreaux méditaient leur forfait.

Quand notre pauvre armée a subi la défaite,
On fit appel à lui pour sauver le pays,
Il protégea la France en proie à la tempête,
Continuant à lutter contre nos ennemis.

Ce soldat ce grand chef a sauvé la Patrie
Trois fois : car c’est bien lui le vainqueur de Verdun
Qui a pu mettre fin à la mutinerie
Avec humanité ; la troupe aimait Pétain.

On pouvait craindre alors le sort de la Russie
Et la guerre civile embrasant la nation.
La révolte grondait entraînant l’anarchie,
Il a su réprimer avec modération.

Encore on l’appela, le seize juin quarante,
Pour redresser la barre on lui confia le sort
Et le cruel destin d’une France expirante,

Ce sauveur fut pourtant un condamné à mort.
Il avait accepté cette tâche écrasante,
Il tint d’une main ferme un branlant gouvernail,
Il a su soutenir la France chancelante,
Et nous avait appris la valeur du travail.

Il ne cessa jamais d’œuvrer pour la famille ;
Dans un pays meurtri elle était en danger ;
Un million de soldats s’accrochaient à la grille,
Prisonniers loin des leurs qu’il fallait protéger.

À la fin de sa vie, il servit la Patrie,
Avec persévérance et malgré l’occupant,
Il protesta toujours contre la barbarie,
Ce fut lui à Vichy le premier résistant.

Au cours de son procès et de sa fin inique,
Ils ont bafoué tous et le droit et la loi,
Et devant l’imposture, il s’est montré stoïque.
Debout nous protestons quand le mensonge est roi.

Avec solennité, nous réclamons justice,
En élevant ici notre protestation.
Le maréchal avait choisi le sacrifice ;
Devant ce blanc tombeau, contre l’accusation,
La révision s’impose, admirons sa mémoire ;
Nous faisons le serment de lutter pour l’histoire.

  ***
Et puis nous visitons le fort de Pierre-Levée ;
Aucun signe de vie, à part des promeneurs ;
Qui se souvient de cette horrible destinée,
Du vieillard qui connut la gloire et les honneurs…

À la fin du parcours, nous entrons dans l’église,
Encore nous prions avant notre départ
Pour la France blessée et que l’on martyrise,
Que veuillent nous aider Saint Louis et Jeanne d’Arc.

Nous quittons l’ile d’Yeu, le cœur gros de tristesse,
Où notre maréchal jugé pour trahison,
Pendant près de six ans, dans cette forteresse
Sinistre en vérité, a croupi en prison.

Ile d’Yeu, 23 juillet 2021